Voix de Fukushima Vol.7 Mme Mikiko MATSUNO

Ce qui compte, c’est l’entraide
La ville de Minamisoma va beaucoup changer. Les logements provisoires disparaîtront un jour. J’ai entendu dire que les gens qui ont reconstruit leur maison, ainsi que les gens qui ont emménagé dans les logements sociaux pour les sinistrés, lors de leur déménagement, ont ressenti à nouveau ce qu’ils avaient éprouvé la première fois qu’ils ont emménagé dans des logements provisoires. Les gens qui se sont installés dans leur nouvelle maison pourront commencer à se sentir chez eux. Au contraire, les gens qui se sont s’installés dans de vastes logements sociaux pour les sinistrés resteront dans la même situation. S’ils ne peuvent pas échanger librement avec les habitants locaux, ils ne pourront pas trouver leur place.
Si on regarde le séisme de 1995 à Kobe, après le début d’une nouvelle vie, le nombre des morts solitaires (kodokushi) avait augmenté, d’après ce que j’ai entendu. Même si les gens avaient supporté la vie dans les logements provisoires et avaient réussi à commencer leur nouvelle vie, sans relations humaines, il ne restait que la solitude. Tant que je participe à cette entreprise, je veux soutenir les gens au maximum. En même temps, je voudrais mettre à contribution mon expérience pour produire quelque chose à l’avenir.
Aujourd’hui, “Makokoro” vient aussi en aide aux gens qui ont commencé une nouvelle vie. Même si certains gens ont déjà quitté les logements provisoires, ils repassent au salon. C’est parce que nous avons passés ensemble plus de 4 ans, et puis peut-être parce qu’ils ne peuvent s’habituer que petit à petit à leur nouvelle vie.
Même si on reconstruit une maison, on ne pourra jamais retrouver sa vie d’avant la catastrophe. Bien que le temps passe, on ne peut pas revenir dans le temps. Je pense que les gens qui ont vécu ensemble au salon veulent continuer à s’entraider jusqu’à ce que tout le monde puisse commencer sa nouvelle vie.

En restant positif, on peut changer sa façon de vivre
La vraie reconstruction après la catastrophe est encore très loin. A Fukushima, il y a d’autres lieux sinistrés que Hamadori. Maintenant encore, il y a beaucoup de personnes qui souffrent des dommages causés par les on-dit. On ne peut pas dire « Il n’y a pas de danger à Fukushima ! »
Pourtant, il y a aussi énormément de choses et d’endroits sans danger à Fukushima. La nature est partout présente, on peut profiter des sources thermales, la mer est belle, les fruits, le riz et les poissons, tous sont très délicieux. Même si le département fait partie de la région de Tohoku (Nord-est du Japon), il ne fait ni trop froid en hiver, ni trop chaud en été. La catastrophe m’a donné l’occasion de penser à Fukushima et de la redécouvrir. Quel bel endroit ici ! Maintenant, je trouve que Fukushima est un très bel endroit. Avant la catastrophe, je n’avais jamais éprouvé cela.
Les gens qui fréquentent le salon disent que dans la catastrophe, il n’y a pas eu que de mauvais choses. Cet événement leur a fourni l’occasion d’éprouver de la gratitude davantage qu’auparavant, et d’être heureux même dans leur vie quotidienne. Surtout, ils ont pu se faire beaucoup d’amis, disent-ils en souriant. En restant positif, on peut changer sa façon de vivre. C’est ce qu’ils m’ont appris.
Pour les habitants de Minamisoma, pour Fukushima, merci de continuer à leur apporter votre soutien. Je vous remercie de votre attention.

 

Profil de Mikiko MATSUNO
Habitante de la ville de Minamisoma dans le département de Fukushima, mariée à un pêcheur local, mère des deux enfants. Leur maison située dans un quartier près de la côte, Minamisoma dans l’arrondissement de Kashima, a été totalement détruite par le tsunami. Elle dirige le salon « Makokoro », un lieu de détente pour les sinistrés où ils peuvent bavarder et décompresser, en utilisant une salle de rassemblement au sein d’un logement provisoire (témoignage récolté en décembre 2015)