Voix de Fukushima Vol.5 Mme Chikako YAGINUMA

Le montant de l’indemnité versée par TEPCO dépend du taux de radioactivité. Le fait que les habitants d’un même village touchent des sommes différentes selon le taux de radioactivité, cela instaure une différence entre eux. Je me demande si c’est le but de TEPCO et de l’État. Cela sépare les gens et affaiblit des protestations contre TEPCO et l’État.
Le préjugé contre Fukushima persiste encore. Je suis allée à la préfecture de Miyagi pour une mission de bénévolat en mai 2011 après le tremblement de terre. Dans ce moment de solidarité, quand je me suis présentée en tant qu’habitante de Fukushima, un prêtre qui était venu d’une autre préfecture pour aider m’a dit : « Vous avez la bonté de nous avoir apporté de la radioactivité. ». L’idée que l’on nous voyait de cet œil m’avait sidérée. Il l’avait peut-être dit sans méchanceté, mais j’ai été atterrée par ses paroles. Même dans l’église, il y a des gens qui ont une forte tendance à suspecter l’existance de la radioactivité. Quand nous vendions les légumes, nous avons entendu une personne protester auprès du prêtre : « Pourquoi avez-vous permis l’entrée à ceux dont les semelles ainsi que la voiture ont de la radioactivité ? ». D’un côté, il y a des gens qui soutiennent bien notre vente de légumes de Fukushima, et de l’autre côté, il y a des gens qui n’en pensent pas du bien.
Par ailleurs, même entre les habitants de Fukushima, il subsiste des incompréhensions et des incidents : d’une part, à cause de l’écart des indemnités qui provoque des jalousies et des ruptures et d’autre part, à cause de la diversité des situations des familles. En effet, il y a des réfugiés du tremblement de terre, du Tsunami ainsi que de l’accident de la centrale nucléaire.
Certaines femmes qui habitent dans les zones même hors d’exclusion se sont volontairement réfugiées pour leurs enfants. Comme ce refuge est volontaire, elles ne peuvent pas toucher les indemnités et mènent une double vie. En conséquence, leur vie est financièrement difficile. Les mères pensent à leurs enfants et les pères pensent à leur travail, ainsi même entre mari et femme, les opinions divergent. Les enfants des familles volontairement réfugiées déversent sur leur mère leur colère pour avoir dû quitter leurs amis. Au sein même de la famille, la séparation et la division surgissent. Le problème de l’accident des centrales nucléaires n’est pas seulement la contamination de l’environnement mais également la division humaine et l’appauvrissement relationnel.